Xavier Moreau

Au début de l’opération militaire spéciale, les buts de guerre économiques de Washington semblaient réalistes. Premièrement, il s’agissait de couper les industries européennes, essentiellement allemandes, de l’énergie bon marché russe afin de les pousser à migrer vers les États-Unis. Deuxièmement, il fallait profiter de l’opération pour imposer à la Russie des sanctions qui entraîneraient à coup sûr un effondrement de son économie avec des conséquences sociales et politiques graves. Les façonneurs d’image occidentaux les estimaient capables de provoquer des troubles dans toute la Russie et d’amorcer la fin du « règne » de Vladimir Poutine. Troisièmement, il s’agissait de priver le complexe militaro-industriel russe des ressources nécessaires pour poursuivre l’effort de guerre. Pour Washington, Kiev n’avait besoin de tenir que quelques mois face à l’armée russe, après quoi le cycle : effondrement économique, guerre civile et chute de Vladimir Poutine mettrait fin au conflit. Il est impossible de croire en effet que les élites nord-américaines aient pu un instant imaginer que Kiev, même avec le soutien de l’OTAN, pouvait militairement l’emporter. 

De ces trois conjonctures, la première s’avéra particulièrement judicieuse. Les grandes puissance européennes, l’Allemagne en tête, acceptèrent immédiatement de saboter leurs propres économies pour soumettre la Russie. Les circonstances politiques pour Washington étaient idéales. À partir de la fin de l’année 2022, les grandes entreprises allemandes commencent à annoncer leur déménagement de l’autre côté de l’Atlantique. Le géant de la chimie BASF ouvre la marche. 

Si la destruction de l’industrie européenne peut être considérée comme une victoire historique des États-Unis sur l’Europe, l’opération contre l’économie russe est un échec cuisant. Les sanctions occidentales eurent même un effet bénéfique en Russie. Lorsque Vladimir Poutine annonce, le 22 février 2022, l’opération spéciale, il sait que des cette décision va déclencher une pluie de sanctions occidentales contre son pays. Il déclare d’ailleurs que ces sanctions auraient de toute manière été prises et qu’un pays souverain ne peut accepter de vivre en permanence sous ce genre de menace. La souveraineté ne se partage pas. 

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